Ma chanson court là-bas par delà les rivières

Et j’y plonge vêtu de ma vie aux ailes immenses.

Les villes dorées dansent les danses de l’éternité

Tandis qu’un matelot bénit la terre aux milles images.

Danse ma plume, virevolte et te révolte.

Enfants l’ère des poètes maudits et la souffrance du cabot.

Le flot bleu roule sur nos vies en regardant le ciel

Vagir sa douleur de crapaud.

Des entrailles du monde, nous aspirerons les cathédrales

En léchant les pieds de l’océan.

Fils de l’homme, j’ai connu des abîmes d’amour.

J’aime le gémissement de la pluie.

J’aime la voix de Dante.

J’aime les chemins hagards de poussière.

J’ai des paradis à vendre.

J’ai des hommes qui désirent vivre deux vies.

J’ai la répugnance des mains nues et des ventres

La peur du vivant et les yeux de l’agonisant

J’ai une besace pleine de serpents

Et je rampe à contre temps

Vers un absolu qui crève faute de sang.

Horreur aux toits noirs, cimetières des naissants.

Il y a là-bas une silhouette qui danse

Sur le nu de ma tombe.

Que l’on tire le voile ou bien je vais mourir

Et le jour d’aujourd’hui n’est pas mon jour,

Aujourd’hui sera suivi de longues années de jours

J’aime le jour.

Ce cri de femmes qui monte dans la nuit

Ce chien qui hurle à la mort

Cette sirène qui pleure les existences de trop.

Cette page du livre de l’homme qui vole dans la rue

Ce dédale de rues qui cherche sa fin

Ce tout ça, c’est la Comédie

C’est le rideau qui se lève et qui retombe

C’est tout ça c’est la mer, les murs, les marais

C’est les ruines après l’orage

Le sang qui ruisselle de la dernière plaie

Ce tout ça, c’est lui qui carillonne

C’est Satan crispé à ses barreaux

C’est la pluie, la lutte des temps

Et nous valsons dans les forêts de jeunes fleurs

Nous sommes des essences et nous avons peur des folies

Alors nous nous couchons oubliant de fermer les yeux

Et la vérité venue d’en haut nous frappe en plein front.

L’ivresse se glisse et se tord dans mon lit.

C’est minuit.

Ma main cherche la place vide

Et je crie, j’ai peur, je fuis.

J’ai réveillé la nuit.

J’enfile mon silence et je sors dans la rue

Je poursuis les kilomètres, je poursuis ma défaite

Mon tombeau, mon amour.

L’ivresse m’a mordu aux talons, j’ai vomi.

Je glisse, glisse encore et me cramponne.

J’ai des cheveux dans la main,

Ils sont blonds, ils sont gris.

J’ai des vers dans la main.

L’hiver m’a jeté son manteau sur les épaules

Je ramasse mon nom sur le pavé

C’est un mur, c’est mon front.

Défense d’afficher

Et dire que dans une rue en passant

J’ai vu danser la liberté.

Mes joujoux gisent sur la terre de mon enfance

Mon enfance aux yeux d’or

Qui se rapproche de ma mort.

Les histrions de Dieu ont frappé à ma porte

J’ai dû cracher l’éternité durant pour les voir fuir

Deux par deux, trois par trois, par légions

Laissant des empreintes sales pour le palier.

J’ai laissé mes ailes dans la lutte

Mon corps qui dort sans songe sur une terre chaude

Mon amour crucifié sous l’aile d’un bel après-midi.

J’ai gardé mes rêves et mon navire

Et je vogue par dessous ta porte

Sous ton plafond de pierre

Si bas que mon âme en perd le souffle.

Et voici le grand navire qui s’échappe,

Voici ma rencontre avec les jours à venir

Qui vont Naître demain de sang et de paradis.

J’écouterai le chant des roues berçant ma maladie

Et je reverrai le train de mon rêve

A genoux sur la fumée, dans un grand bruit de sifflet.

Je perdrai mes amis à l’arrière

Je chevaucherai leur sourire

Et mon regard plus loin dépouillera l’ombre,

Adieu les derniers vestiges

Voici la première pierre de ma nouvelle vie

Et les grands arbres aux désirs inassouvis.

Un dernier regard, maintenant vers ta robre

Qui s’envole à tout vent, à tous espoir

Riveraine de mon cœur, donne ta main

Voici ma plaine chargée de tombereaux d’amour

Douce souveraine, connais-tu le pays des neiges,

Des claires fontaines et des marchands d’avril.

Gentilles, lointaines seront nos filles aux champs de blé

Et je verrai tout de même l’ombre de tes longs cheveux

Flotter sur ma vie ainsi qu’un chiffon de dentelles.

Mes sanglots se sont égrenés

Tout au long des murs

Le train est entré en gare

Les enfants de mon amour ont disparus derrière les dunes

Les heures de mes jours sont tissées de perles fines

De longs cheveux pâles entoureront mon au-delà

Aux longs jours de décembre si plein de moi

Les cathédrales sont submergées par mon sang

Et seul parmi tous les colifichets

Le christ a surnagé

Mais mon œuvre m’indique du doigt une tombe

Où je trouverai la douceur mère de ma mère

Encore enfant j’y descends

Faisant mourir à chaque pas

Une étoile, une lune, une femme, un sourire.

La nuit m’enveloppe, douce,

Le jour se voile sous un chant d’amour,

Je me conte en riant le rêve de la vie.

Je sens sur mes yeux le baiser de la terre

Et demande pardon à ma nouvelle mère

La vanité du ciel m’apparaît virginale.

Sous les traits d’un miroir aux regards blancs

J’entonne ma dernière chanson

Elle parle de ceux qui furent et ne sont plus

Et pour la première fois au bout de milles routes

Je saisis l’innocence inconsciente du néant.

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